mercredi, août 31, 2005

transport

C’était pendant son chemin vers la gare que les idées paralysantes commencèrent à gémir dans sa tête. L’idée même de gare avait provoqué le déclenchement d’un mécanisme de stimulation qui se manifesta dans des associations aléatoires et imprégnées par les acquis sémiologiques et culturels. C’était sa mémoire visuelle, et toutes les autres, qui propageaient des fragments d’idées.

La gare, cet élément tellement présent dans la littérature française, cet héro de tellement de romans, était symbole d’égarement. D’ailleurs la racine étymologique témoigne de quelques relations que l’histoire des mots range dans un certain tiroir.

C’était un signe, certainement pas un signe divin, puisque la présence divine n’a occupé aucune fonction motrice dans le schéma de son existence mais un signe quand même. Il ralentit le rythme de ses pas. D’un regard admiratif il contempla la grandeur tellement cinématographique de cette gare. Il ne pouvait à ce moment cerner le degré de réalisme que ses yeux lui transmettaient. Serai-ce des pinceaux de peinture d’un peintre médiocrement doué, d’un peintre qui ne survivra que dans l’oubli de l’histoire, dans l’oubli de la création. Cette question lui restera toujours sans réponses, sans réponse.

A cet instant il savait qu’il allait reprendre ce même chemin mais inversement, mais ses pieds et ses yeux, toutes les forces motrices de son corps ignoraient ce fait. Il s’approchait de l’intérieur, à présent il connaîtra l’âme de cet endroit, de ce lieu, de cet espace.

Ce n’est pas la grandeur de la foule qui importe dans les gares et les espaces de déplacement massif. Mais c’est plutôt le rythme avec lequel elle se meut. D’ailleurs une raison simple peut expliquer ce phénomène et c’est le fait que les déplacements sont régis par des contraintes temporelles assez précises, du moins explicitement imposantes. L’action de toute cette foule était gouvernée par des chiffres qui décident le temps, le passage du temps, le déroulement de la vie, c’était dans ce genre de foules qu’on touche directement et clairement le pouvoir fatal du temps sur l’homme. C’était la représentation, l’allégorie idéale.

Attendre dans une gare était l’acte le plus symbolique de la vie. Une attente qui ne dépend que du temps, de cet élément seul. Car le moyen de transport va irréfutablement arrivé à un moment ou à un autre, mais il lui faut un moment et c’est là que le temps domine. L’attente est pour le moment et non pas pour le train, car le train, lui, va venir à un moment, n’importe quel moment.

Lui

Il s’était trouvé par sort ou par volonté dans une foule parlante. Son regard simulait un phare, mais il n’y avait ni mer ni marin, que des navires désertés par leurs capitaines fictifs. Pour lui, c’était un moment inévitable, un passage qu’il ne pourrait éviter, il avait pris la route de l’inconnu et ne voulait pas y renoncer.

Des mots volatils se répandaient dans l’air frais de la ville, des conversations multilingues, des discours limités par des barrières humaines, des barrières qu’il avait prévues. Il n’était pas, c’était un autre, son ombre. Un spectre qui lui avait volé son être momentanément.

Ses idées, quelques idées, avaient survécues. Elles le tourmentaient par moments, et hantaient son spectre.

C’est la nuit qui le ressuscita, elle avait depuis longtemps empoisonné son esprit par sa beauté tragique. Il était inconsciemment amoureux de la nuit, il aimait ses caresses intimes, il aimait son regard mystérieux, son ombre qui noyait ses occurrences dans un semblant de calme maussade. Il aimait sa maîtresse nocturne, sa déesse. Les grecs l’appelaient parfois Euphroné ou même Eubulie, Mère du bon conseil. La mère des dieux, fille du Chaos, fille du Ciel et de la Terre, elle avait précédé toute chose. C’était seule qu’elle a engendré « l’inéluctable et inflexible » Destin, mais aussi la Mort et tout ce qui est mal dans la vie.

Pourtant elle lui procurait un barrage contre toute infortune. Chaque jour il l’attendait, partout, il attendait son odeur qui annoncera la douceur de sa peau sur la sienne, l’amertume délicieuse de ses lèvres.

Le lendemain, il hésita, il ne voulait pas se reperdre.

Le lendemain, il attendit la nuit.

mardi, août 30, 2005

De l'amour

“Rien n’est beau que le vrai, le vrai seulement est aimable.” Boileau

« Vous doctes à la haute et profonde science,

Vous qui devinez et qui savez

Comment, où et quand tout s’unit,

Pourquoi tout s’aime et se caresse ;

Vous, grands savants, instruisez-moi !

Découvrez-moi ce que j’ai là,

Découvrez-moi où, comment, quand

Et pourquoi pareille chose m’arriva. » Bürger

« Quant aux degrés inférieurs et aux simples amorces de cette passion, chaque homme les a journellement devant les yeux et aussi, tant qu’il reste jeune, presque toujours dans le cœur. » Schopenhauer, Le monde comme volonté et comme représentation, métaphysique de l’amour.

« O toi qui supprimes l’oubli, l’espoir et l’ignorance,

Qui supprimes l’absence et qui me mets au monde,

Je chante pour chanter, je t’aime pour chanter

Le mystère où l’amour me crée et se délivre.

Tu es pure, tu es encore plus pure que moi-même. » Paul Eluard, Capitale de la douleur.

« Nous aurons des lits pleins d’odeurs légères,

Des divans profonds comme des tombeaux,

Et étranges fleurs sur les étagères,

Ecloses pour nous sous des cieux plus beaux.

Usant à l’envi leurs chaleurs dernières,

Nos deux cœurs seront deux vastes flambeaux,

Qui réfléchiront leurs doubles lumières

Dans nos deux esprits, ces miroirs jumeaux.

Un soir fait de rose et de bleu mystique,

Nous échangerons un éclair unique,

Comme un long sanglot, tout chargé d’adieux ;

Et plus tard un Ange, entr’ouvrant les portes,

Viendra ranimer, fidèle et joyeux,

Les miroirs ternis et les flammes mortes. » Charles Baudelaire, Les fleurs du mal.

« Blanche cicatrice, saignée de lune, danseuse de joie, je suis tombé dans ta cité, et tout au fond je me levai, et tout au fond je me tendis, à l’heure figée, je me tendis et te tendis ma chair, et le feu qui tombait s’éteignit dans le sang, du fond de toi j’était, du fond de toi je me livrai, pour tes grands yeux d’attente, pour ta raison et pour ta vie. Ce fut l’abîme entier où le plaisir allait se perdre, l’arrêt complet.

Je m’ouvris une bouche dans ton corps – la mer glissant à l’envers de tes yeux – le jour calmé soudain dans un fourreau d’opale – ma lointaine tu te formas, tu te rendis et tout se rapprocha, il n’y eut plus entre nous que le pouls combiné de notre espace. La mère du feu te donna le sein, le grand jour de notre union, voici qu’il se leva, et toutes douleurs broyées, l’aveugle vit les mains, prends tout, prends tout te dis-je, et que ton nom soit ma vie. » Jean Pierre Duprey, Premiers poèmes.

« Métaphysique de l’amour »

Lui, son nom lui était inconnu. Il avait perdu le désir de se nommer depuis bien un temps. Du moins, si désir il lui reste, il avait en tout cas renoncé à l’accomplir. C’était un spectre perdu, quelque part, tel une bouteille vide lancée à travers les océans, il flottait et cherchait une terre, sans vraiment une destination et pas vraiment volontairement.

Malgré les proverbes et les histoires populaires, il tombait toujours dans les pièges de la vie et des vivants. Un être de passion qui s’adonne à la raison. Un esclave qui rêve de la liberté, un esclave imaginatif. Souvent il se laissait trahir par des songes, mais, lui, vivait toujours dans sa réalité, point de songes ne lui sont irréels. Il avait le pouvoir de créer des mondes et des réalités. C’était un réalisateur, un être qui réalise, qui rend réel.

Elle, portait tous les noms, elle était unique. Mais elle ne connaissait pas ses noms, elle ne connaissait qu’un seul, le sien, pas ceux des autres, pas ceux de l‘autre. Elle ne savait pas qu’on l’appelait de tous les noms, qu’il l’appellera de tous les noms, elle ne savait pas qu’elle était toutes les femmes. C’était dans un rêve qu’elle est née, elle portait la culpabilité de toute l’humanité autant que tous les nouveaux-nés. Mais c’est quelque part dans son age plus conscient qu’elle s’en ait rendu compte. Et c’est à ce moment qu’elle s’est rencontrée pour la première fois, c’est à ce moment qu’elle a cessé de voir la beauté, sa beauté.

Elle vivait dans son mensonge, avec sa culpabilité, avec sa tragédie. Elle laissait des débris de son existence un peu partout, des fragments de ses espoirs, des bouts de son histoire. Elle résistait toujours aux rêves, elle s’attachait toujours à la réalité, à sa réalité et celle des autres. C’était un saut qu’elle avait jusqu’à présent évité, combattu, mais plus que tout qu’elle avait craint. Pourtant elle s’adonnait parfois à la tentation, aux charmes fatals du rêve.

C’est l’histoire de la vraisemblance d’un rêve, c’est un drame ou une tragédie, une fatalité ou un destin. Leur histoire c’est celle de la vie, celle des récits. Leur histoire n’aura qu’une vérité pour fin. C’est le triomphe d’un rêve qui envahira la réalité, qui la supprimera. Ou bien l’histoire d’une mort commune d’un rêve passager. C’est le combat éternel entre volonté et réalité.

Leur histoire, c’est l’histoire de l’amour.

lundi, août 29, 2005

Cycle

Un récit journalier, une transmission écrite des occurrences sensorielles quotidiennes. Comme le jour provoque tôt ou tard l’ouverture physique de mes yeux, je me lève pour faire honneur aux besoins corporelles, instinctifs et sociaux. Je consomme et je sème des souvenirs de mon corps, dans le monde matériel. Puis je m’expose à la communication, par besoin ou par désir. Ensuite un moment d’existence personnelle.

Le temps n’épargne rien. C’est un être logique, juste. Le moment arrive où je dois ou je veux sortir, et l’acte suit peu après. Je me lance dans des besognes et des voyages, je fais, je paye, je regarde, je vois, je touche, j’entends puis je pense et je reviens.

Pour ce qui est de l’observation, le tourisme de la conscience, le récit serait le suivant.

L’ouverture de la porte d’entrée dégage un vent étrange, un vent qui porte les odeurs de la vie palpable. Je m’éloigne lentement, peu après je me trouve engourdi dans la rue, une ombre parmi d’autres.

C’est bien un phénomène, le fait de se trouver au milieu d’une foule, connaître pour un instant qu’on est rien qu’un exemplaire de cette espèce qui n’existe qu’en foules. C’est pendant ces instants que je me sens emporté par la déception la plus ardente de n’être qu’une de ces ombres, et le plaisir le plus délicieux d’être conscient de ce drame, d’avoir la connaissance que ceci est un drame, ou, peut être, dans le cas le plus optimiste, une tragédie.

Je me réjouis d’avoir atteint la certitude que telle chose que le sourire de satisfaction continu, ce que les plus ignorants appellent le bonheur, n’existe que dans les esprits et les livres. Lorsque je suis emporté par une présence humaine, je pense souvent à Cioran, j’essaye d’imaginer son sourire, car moi je l’imagine avec un sourire. Certainement pas un sourire idiot, pas un sourire de bonheur, mais un sourire pervers et sarcastique. Je laisse échapper un sourire parfois.

J’ai acheté un livre de poésie française du XVIIe siècle aujourd’hui, j’ai trouvé ces vers intéressants. Le poète s’appelle Godeau, il était petit et moche, après avoir été au service de Richelieu pour quelque temps à divertir une certaine dame, Richelieu lui demande de rentrer dans la vie ecclésiastique, et rapidement il devient évêque de Vence. Peu après il détruit tous ses vers amoureux et se lance dans la poésie chrétienne, il composa abondamment. Mais en lisant ces vers je n’ai pu voir qu’un dieu inexistant.

« Mortels dont l’esprit curieux

Veut tout connaître et tout comprendre,

Et qui, n’étant qu’un peu de cendre,

Pensez souvent être des dieux ;

Votre âme, à la chaîne attachée,

Se trouve à son vol empêchée,

Son plus beau jour n’est qu’une nuit ;

Tous ses trésors n’ont rien de rare,

Et sa conscience l’égare,

Se vantant qu’elle la conduit. » Godeau, Hymne à la naissance du Seigneur.

Dissolution

Enfin la nuit tombe portant avec elle les mots dans mon esprit. Enfin se termine cette séquence quotidienne, et je retrouve mon écran, le miroir de mes pensées.

Le début est désormais proche. Je redoute l’avenir comme on redoute la mort, ou tout simplement tout inconnu.

Je sais ce que je suis, ou ne le serai-je pas. Ne reste que l’affrontement, ne reste que le contact humain. Parfois lorsque je me trouve au contact des gens, j’ai l’impression de ne pas me reconnaître, j’ai l’impression que les mots et les gestes sont les valets d’un corps étranger. Ensuite je suis souvent pris par des crises internes de colère. Mais rapidement, et comme si dans ces mêmes moments ma conscience elle aussi est captive de ce tyran, je retrouve le calme.

C’est ce schisme existentiel que j’essaye de réparer. Mon ambition c’est l’unicité de moi même et de moi. Je pourrai même me lancer dans une improvisation langagière et dire que c’est l’union du moi et du soi.

Au premier instant c’est tout l’esprit qui se dévoile ou, du moins, c’est tout le corps. Le corps possède son existence individuelle ; quelqu’un peut très bien être un autre. Rimbaud avait bien écrit « Je est un autre », il avait bien affirmer la dualité, au moins.

« Je suis de ceux qui ne voient pas la surface de la mer mais ses fonds, ses trous, ses monstres, ses fantômes.

Je suis de ceux dont les yeux sont partis pour l’horizon. » Jean Pierre Duprey, Premiers poèmes.

dimanche, août 28, 2005

Désir

« Sans cesse à mes cotés s’agite le Démon ;

Il nage autour de moi comme un air impalpable ;

Je l’avale et le sens qui brûle mon poumon

Et l’emplit d’un désir éternel et coupable. » Charles Baudelaire, Les fleurs du mal.

C’est un monstre d’une beauté fatale, un ogre charmeur, une sirène anthropophage. Une religion sans pareil, la religion, la seule. S’il y a un dieu, puissant comme le monde, vaste comme la nature, c’est ce labyrinthe aux façades morbides.

Combien de fois me suis-je noyé dans ces eaux transparentes, combien de larmes avais-je réprimé. La drogue dévastatrice des poètes.

C’est une femme, une créature belle comme la nuit, aussi vivante que le jour. Une déesse aux yeux qui font trembler les hommes, qui détruisent le temps. Femme de mes rêves, femme de l’imaginaire, l’objet de mes supplices et de mes frayeurs.

La raison n’a qu’un seul ennemi, la volonté n’a qu’un seul supérieur, qu’un seul être indomptable, cette femme, cette Aphrodite de la conscience. Je me suis longtemps battu dans cette guerre amoureuse, cette guerre éternelle.

Dans mes épisodes nocturnes, je la vois, je la regarde, pendant des années, des siècles et des fragments de secondes, je l’admire de loin, sans jamais avoir le courage de m’approcher, moi cet être méprisable, ce quadrupède arrogant, je la contemple d’un regard admiratif, hébété par l’espoir.

Dans cette réalité imaginaire, parfois, je touche sa peau, meurtrière des hommes, je goûte les vallées enchantées de ses lèvres, animatrices d’histoire et de mythes, je dévore ses mains, porteuses de l’immortalité instantanée. Je deviens elle. Elle n’est plus, rien que le rêve ne demeure. Nous disparaissons. C’est à ce moment seulement que la femme devient désir, c’est à ce moment seulement que le désir devient femme.

« En fin de journée je t’ai rencontré éternel compagnon, tes mains avaient le dynamisme d’un instrument de torture, ta poitrine, violon sonore, contenait les hurlements de toute une peuplade en révolte, de plus les roulis de tous les navires du monde étaient dans tes yeux.

Ce soir cher compagnon, je m’inscrirai en toi comme dans une tombe et nous ne ferons plus qu’un pour rêver à ces étranges voyages de fleurs. » Jean Pierre Duprey, Premiers poèmes.

Disparition

« Je n’invente pas les mots. Mais j’invente des objets, des êtres, des événements et mes sens sont capables de les percevoir. Je me crée des sentiments. J’en souffre ou j’en suis heureux. L’indifférence peut les suivre. J’en ai le souvenir. Il m’arrive de les prévoir. S’il me fallait douter de cette réalité, plus rien ne serait sûr, ni la vie, ni l’amour, ni la mort. Tout me deviendrait étranger. Ma raison se refuse à nier le témoignage de mes sens. L’objet de mes désirs est toujours réel, sensible. » Paul Eluard, Donner à voir.

Mécanisme

Ce n’était pas un rêve, mais ce n’était non plus un moment de conscience excessive. C’était un moment, des instants, le flux temporel qui ne cesse qu’à l’instant attendu et redoutable de la mort. C’était un jour, un fragment de jour, un épisode journalier, je me lançais dans les rues de cette ville, comme je le fais souvent à présent. Je ne sais si c’est le mouvement lui même, l’instinct de découverte, ou simplement la misanthropie qui m’empêchait d’arrêter le mouvement régulier de mes pieds. Les rues se métamorphosaient devant mes yeux, des gens, des ombres vivantes, des objets, des paysages, des représentations extérieures qui me procuraient à cette distance un confort rassurant. J’étais immobile et tout autour de moi bougeait, tout.

C’était le déplacement lui même qui m’a toujours procuré un refuge inégalé. Le mouvement dans l’espace possède bizarrement l’allusion d’une excuse pour être seul. Je marche pour fuir l’immobilité sociale.

« Nos espérances sur l’état à venir de l’espèce humaine peuvent se réduire à ces trois points importants : La destruction de l’inégalité entre les nations, les progrès de l’égalité dans un même peuple, enfin le perfectionnement de l’homme. » Condorcet.

Utopie signifie nulle part.

vendredi, août 26, 2005

Assertion

“ La vie et les rêves sont les feuillets d’un livre unique; la lecture suivie de ces pages est ce qu’on nomme la vie réelle; mais quand le temps accoutumé de la lecture (le jour) est passé et qu’est venue l’heure du repos, nous continuons à feuilleter négligemment le livre, l’ouvrant au hasard à tel ou tel endroit et tombant tantôt sur une page déjà lue, tantôt sur une que nous ne connaissions pas; mais c’est toujours dans le même livre que nous lisons.” Arthur Schopenhauer, Le monde comme volonté et comme représentation, Livre premier.

Signature

Serai-ce une coïncidence ou simplement un tour du sort ? Une activité quotidienne et nocturne, tellement normale par son anormalité, le rêve est une réalité supérieure à toutes les autres.

J’étais plongé dans la lecture de Donner à voir, ouvrage d’un certain Paul Eluard, lorsque l’épisode d’un rêve me fut commandé. Ce livre qui fait l’autopsie de la poésie, de l’imaginaire et de l’homme, est certainement des plus beaux écrits sur le rêve à travers l’infinité des phrases de l’histoire.

Parmi l’abondance de phrases à retenir dans ce livre je citerais une qui me permettra de passer à une conception différente du rêve, celle de Schopenhauer.

Cette phrase n’étant pas du rêve mais touche plutôt une chose bien que plus générale, une méthode, ou même une attitude envers le monde, soi, et la connaissance.

« Tu ne lis que pour découvrir, contrôler ou corriger ce que tu penses. Signes ce que tu approuves. » Paul Eluard, Donner à voir.

Et c’est tel que je fais, une signature, une faible appréciation, une révérence aux résidus d’esprits révolus.

« Le monde est ma représentation. » C’est par cette phrase, dont je tiens pour essentielle, que Schopenhauer débute ses propos. C’est dans cette phrase que se trouve le substrat de tout notre entendement, de tout notre être. Ce n’est point une phrase, c’est le principe premier, le principe unique, duquel découlent tous les autres, tous les principes seconds et secondaires.

Du rêve Schopenhauer écrit, entre autre : « …Nous avons des songes ; la vie toute entière ne pourrait-elle donc pas être un long rêve ? Ou, avec plus de précision : existe t-il un critérium infaillible pour distinguer le rêve de la veille, le fantôme de l’objet réel ? On ne saurait sérieusement proposer comme signe distinctif entre les deux le degré de netteté et de vivacité, moindre dans le rêve que dans la perception ; personne, en effet, jusqu’ici, n’a eu présentes à la fois les deux choses à comparer, et l’on ne peut mettre en regard de la perception actuelle que le souvenir du rêve. Kant tranche la question en disant que c’est « l’enchaînement des représentations par la loi de causalité qui distingue la vie du rêve ». Mais, dans le rêve lui-même, tout le détail des phénomènes est également soumis à ce principe sous toutes ses formes, et le lien causal ne se rompt qu’entre la veille et le rêve ou d’un songe à l’autre. La seule interprétation que comporte la solution kantienne est la suivante : le long rêve (celui de la vie) est réglé dans ses diverses parties par la loi de causalité, mais n’offre aucune liaison avec les rêves courts, bien que chacun de ceux-ci présente en soi cet enchaînement causal ; entre le premier et les seconds le pont est donc coupé, et c’est ainsi qu’on arrive à les distinguer.

Toutefois, il serait assez difficile, souvent même impossible de déterminer, à l’aide de ce critérium, si une chose a été perçue ou simplement rêvée par nous ; nous sommes, en effet, incapables de suivre anneau par anneau la chaîne d’événements qui rattache un fait passé à l’état présent, et pourtant nous sommes loin de le tenir en pareil cas pour un pur rêve. Aussi dans l’usage de la vie, n’emploient-t-on guère ce moyen pour discerner le rêve de la réalité. L’unique critérium usité est tout empirique ; c’est le fait du réveil qui rompt d’une manière effective et sensible tout lien de causalité entre les événements rêve et ceux de la veille. » Arthur Schopenhauer, Le monde comme volonté et comme représentation, livre premier, le monde comme représentation.

« L’homme est le rêve d’une ombre. » Pindare

« Je le vois, tous tant que nous vivons, nous ne sommes que des fantômes, une ombre vaine. » Sophocle, Ajax.

“We are such stuff

As dreams are made of, and our little life

Is rounded with a sleep.” Shakespeare.

Un jour on m’a demandé un rêve

« Imaginer est souvent un terme commode pour différencier l’homme du monde qui l’entoure, pour lui créer un univers abstrait, égoïste, pour l’isoler. A partir du moment où il doute de la réalité concrète de ce qu’il imagine, inutile qu’il essaie d’en donner idée, de faire voir, de savoir. Si, par exemple, cette femme dont il rêve n’existe pas pour les autres, inutile d’aimer. Qu’il se repose sur ses instincts diminués, qu’il renonce, qu’il s’interdise. » Paul Eluard, Donner à voir.


« On ne peut plus dormir tranquille quand on a une fois ouvert les yeux. » Pierre Reverdy, La Lucarne Ovale.


Genesis

As the remains of the defeated sickness forsake my recovering body, I find myself faced with a reality I hadn’t until now fully comprehended.

Spending my days between book pages, moving streets or touching these plastic letters can no longer be gratified as a daily task. I look around, then turn to my inside, and yet don’t seem to find the answer, not even a clue. It is on that particular moment, on that exact second, that my doubts regained sovereignty over my thoughts.

As I cannot call that state panic, for the lack of true explicit agitation, I could instead refer to it as a state of astonishment, that which is the immediate trailer of shock. It is a moment of pause, a moment of admiration, of examination, a predecessor to the act itself.

With whatever information one might possess, a decision must be obtained. Action is inevitable; it is the only true presence.

If I was to be my self, I must start with being, which is nothing but a state of action.

As time flies by, I stand still looking at the residues of my past and present life, thinking, and sometimes writing it, of ways to be. I have been thinking and expressing the desire to self fulfillment and perfect autonomy for countless months and numerous sentences, but yet haven’t reached but so little.

It is so. That shall be the title of this episode; that shall be its happenings.

« Je discerne avec peine ce que je vois avec les yeux de la réalité de ce que voit mon imagination. » Achim d’Arnim, Contes bizarres.

mercredi, août 24, 2005

Graphie

S’il existe un paradigme qui réunirai les différents arts dans le sens de leur fonction portée dans l’expression culturelle d’un peuple donné, il serai intéressant de noter le cas du cinéma dans les sociétés actuelles.

En fait depuis que la technique permet une recréation de la réalité en image. Donc en quelque sorte depuis que l’homme possède une technique qui lui permet de dessiner avec ce qu’il voit, le langage visuel a pris une dimension complètement nouvelle.

A présent une société peut non seulement voir, mais « donner à voir ». Dans la formule de Paul Eluard donner à voir serai le rôle du poète, mais dans ce cas le poète n’est autre que l’homme lui même. « La fin de l’imaginaire », peut être, mais reste que l’image est à présent un indice culturel indissociable de la société qui la transmet.

Dans l’étude historique, archéologique ou anthropologique, l’étude de l’art est souvent révélatrice des coutumes mais aussi des modalités de pensée et de comportement de la société étudiée. Ainsi un art caractérisé par une surabondance de portraits royales ou divins reflète une société imprégnée par cette présence, ceci étant un exemple simpliste de l’analogie existante entre art et culture.

La production visuelle a connu en parallèle avec les développement techniques un essor remarquable notamment dans les années 90s du siècle dernier.

Effectivement c’est l’accès presque universel aux techniques de réception mais aussi d’émission de l’image qui ont porté le plus grand changement dans ce domaine.

Si c’est la camera d’un touriste qui enregistre un moment aléatoire dans la vie de personnages anodins dans tel ou tel endroit, ou bien les lentilles d’appareils cinématographiques qui impressionnent des films destinés à des projections publiques nationales, locales ou internationales, l’image est a présent un produit de masse. Un produit accessible à tout le monde et en tout temps, sinon presque.

« Le langage est un fait social, mais ne peut-on espérer qu’un jour le dessein, comme le langage, comme l’écriture, le deviendra et, qu’avec eux, il passera, du social, à l’universel. Tous les hommes communiqueront par la vision des choses et cette vision des choses leur servira à exprimer le point qui leur est commun, à eux, aux choses, à eux comme choses, aux choses comme eux. Ce jour là, la véritable voyance aura intégré l’univers à ce jour là, la véritable voyance aura intégré l’univers à l’homme – c’est à dire l’homme à l’univers. » Paul Eluard, Donner à voir.

Entre le travail du poète et celui du cinéaste existe une nuance souvent surestimée. Comme le décrit Paul Eluard, le poète doit jouer le rôle d’un miroir distordant la réalité afin de l’emmener à un état plus réel, un état qui sera l’image de l’impression dans les yeux du poète. Le cinéaste déforme la vision du monde, il déforme la réalité objective pour ainsi créer sa propre réalité, celle qui, libre de tout les préjugés du réel, porte en elle seule un sens infini. C’est au moment de la perception de l’image que celle ci acquiert son sens et même son existence.

Le cinéaste est le poète de l’image, le poète de la vision. C’est celui qui a le droit et la responsabilité de transmettre la réalité autrement, d’une façon imprégnée par son intellect, son affect et son résidu socioculturel. Le cinéaste est le rêveur des temps post-modernes, où l’imagination a atteint le degré le plus réel, le plus palpable, où l’imagination devient universelle, accessible à tous. Le cinéma avait annoncé la fin de l’imagination mais à présent c’est l’imagination dans son état le plus vif. Image est imaginaire, étymologiquement liés, sont deux concepts fort contradictoires dans leur essence, mais dont l’un peut être le moteur de l’autre et réciproquement. C’est le passage « du social à l’universel » qui a donné au cinéma (et plus encore à la production visuelle en général) son rôle actuel dans l’empire des arts. Le cinéma c’est la poésie visuelle, la poésie directe, explicite.

Une société sans poètes sera l’enfer de l’histoire. Une société sans poète est une société qui n’a ni passé ni avenir, c’est une société qui n’est qu’au présent et inconsciemment, une masse uni-temporelle et latente.

C’est le poète qui donne sens aux mots, qui crée le temps. Le cinéaste, lui, donne une forme aux images. Quelle forme les plaines de l’Iran avaient-elles avant que Kierostami les filme. A quoi ressemblait Paris avant que le Pierrot de Godard la ravage ? Même les Etats Unis, ont ils vraiment une forme sans les caméras de Hollywood, mais aussi celles des réalisateurs New-yorkais ? Et les samouraïs de Kurosawa, et, et…

L’histoire impose des contraintes qu’une société doit respecter afin de subsister. Si un jour la peinture, ou la poésie exprimait les valeurs innées et acquises d’un peuple, le cinéma à présent est le langage culturel par excellence. Parler avec des images. Montrer ce qu’on voit, « donner à voir », voilà ce qu’est le cinéma.

Elaboration

Lorsque j’ai décidé que je dois changer de décor dans ma vie, c’était pendant un trajet solitaire en voiture sur l’autoroute de la tranquillité quelque part sur le littoral libanais. Je me souviens toujours de ce jour où, sans vraie destination prédite, je me suis lancé vers la montagne du Chouf. Provisions a portée de main et musique ambiante, je me suis trouvé après quelques kilomètres longeant une falaise biblique par son apparence mais compacte par ses dimensions. Je me trouvais à l’instant seul avec moi même et mes pensées les plus intimes, je me suis réjoui de savoir que j’étais toujours. Surchargé à l’époque pas l’insignifiance de la bureaucratie, l’une des séquelles les moins agréables de la colonisation, et préoccupé par la fécondation d’un court métrage fort impressionné par mon état d’âme.

L’idée que j’avais construite portait surtout sur la solitude productive, et par solitude je ne veux point dire ermitage, mais plutôt un état dans lequel le contact humain est réduit à un minimum contrôlable et contrôlé. Bien que je ne puisse pas encore porter de jugement sur l’éventuelle réussite de ce projet, je peux simplement affirmer que tel jugement est en phase de réalisation ou du moins en phase de préparation. Désormais seul l’acte peut subsister.

« Come back now to your sober senses ; recall your true self ; awake from slumber, and recognize that they were only dreams that troubled you ; and as you looked on them, so look now on what meets your waking eyes.” Marcus Aurelius, Meditations.

Etymologie rationnelle

La coupe de tisane se vidait peut à peut, l’effet apaisant torturait ma gorge avec une allusion d’un soulagement momentané. J’avais fermé le livre, tout en pensant à demain. Ma volonté se réveillait d’un sommeil qui dura presque une semaine, pendant laquelle corps et esprit se dissimulaient derrière un semblant de tranquillité apparente.

C’est à ce moment précis que je me suis dis que l’acte est indéniable. C’est à cet instant même que je me suis rendu compte que la vie est une œuvre, elle est même un produit. Auteur de mots, je dois pousser ma création à l’acte, l’acte de vivre.

A l’age adolescent, pendant les séquences de réflexions existentielles communes à cet age-là, je pensais avec toute l’immoralité et l’amoralité qui décrit tellement mon âme, que j’étais dieu de moi. Je portais tellement de mépris envers ce créateur pervers et arrogant, que je ne pouvais tolérer l’idée que l’homme pouvait vénérer une chose tellement macabre.

Je ne peux dire que j’ai jamais pu profiter de ce confort sécurisant de la croyance, en fait l’idée qu’une force extérieure veille sur mon monde et mon être ne m’a jamais caressé avec ses douces mains maternelles. Entre le doute et le scrupule je me suis longtemps noyé dans les spéculations souvent sinistres et agitées.

Je ne suis pas certain de la raison pour laquelle je me lance dans des rétrospective temporelles de ce genre, mais je sais que je trouve souvent des réponses en réévaluant le passé. C’est peut être une des facultés uniques chez l’homme, la récapitulation, l’acte de revoir le passé d’un œil observateur mais impliqué.

Je constate à présent que ce n’est point la vraisemblance qui donne sa valeur à l’idée dans l’échelle objective, mais plutôt son rapport avec le cas précis duquel elle émane. Dans ce sens le sujet, mais aussi l’auteur, est le seul qui puisse déterminer la valeur de l’idée elle même. Chaque idée n’ayant donc pas une seule valeur ni même un seul lecteur.

Dans l’avant propos de La généalogie de la morale, Nietzsche écrit : « Nous, chercheurs de la connaissance, nous sommes pour nous-même des inconnus, - pour la bonne raison que nous ne nous sommes jamais cherchés… »

lundi, août 22, 2005

Intervalle

Apres m’avoir momentanément perdu, je commence peut à peu à retrouver ma conscience de soi et de la réalité, bien que lentement et différemment.

Au moment où je prends les quelques souffles herbeux que je me suis permis, j’écris ces mots sans vraiment avoir pour autant des idées spécifiques à aborder.

A chaque fois que je me mets devant cet écran à présent j’essaye, sans vraiment de très bons résultats, de définir ma situation mentale actuelle. Suis-je satisfais ? Suis-je différent ?

Je n’arrive toujours pas à sentir l’ampleur de l’étape que je viens de commencer. Je ne peux dire que je panique, non plus que je sois dans l’état de sérénité, mais je peux simplement affirmer que je vis chaque jour à part. Effectivement il ne faut pas non plus asserter que ceci est la meilleure façon de faire passer les jours. Mais je me rassure en pensant que ce n’est qu’une phase transitoire.

En effet l’avenir, académique, pratique, et existentiel, me semble assez, pour ne pas dire complètement, ambiguë.

Le manque de compagnie livresque (mes livres doivent arriver dans quelques jours, j’espère), me limite à une lecture assez limitée. Une lecture initialement intentionnée pour être effectuée dans un avion, ce qui n’est point semblable à ce que mes yeux ont besoin en ce moment.

C’est en effet un instinct humain, le besoin de communiquer. C’est peut être pour cette raison qu’on nomme besoin de communication et non désir de communiquer.

En effet communiquer ne veut pas simplement dire converser ou bien échanger des données diverses avec une autre conscience ou objet. Communiquer est un acte qui touche autant l’expression dans ses états les plus purs comme l’art et la violence, que ses états les plus souillés comme la conversation et tout ce qui peut se lier à la médiation.

Pendant mes cours en journalisme on employait souvent ce mot, pour des raisons qui n’ont point besoin d’élaboration. Définir la nuance qui sépare information et communication est l’une des tâches les plus vitale dans ce domaine humain par excellence. En effet si on observe la naissance des métiers dans les civilisations il serait fort intéressant de s’arrêter à celui du journaliste.

Un métier dans son substrat social presque parasitaire. En effet on peut se lancer dans des explication stratégiques et purement pratiques qui nous mènerons à dire que les civilisations ont besoin de porteurs d’informations, de gens qui puissent transporter la donnée X de A vers B, A et B étant des lieux ou des individus. Mais aussi on peut choisir l’approche plus morale et dire que cette fonction fait plutôt partie de l’empire de la conscience sociale et l’esprit de l’humanité. Une sorte de mémoire humaine, une fonction qui sera, si jamais tel élément homogène nommé l’Humanité existe, vitale à sa morale et son éthique en changement constant. En effet on pourra donner maintes explications dont ceux là ne sont qu’une partie improvisée, mais ce qui reste dans le domaine de la stabilité logique c’est que toute fonction, sociale ou pas, puise ses sources d’une certaine cause, selon le principe de base de la causalité. Dans ce sens on peut aussi, par une simple approche fataliste et selon la formule de Kafka « tout ce qui est possible arrive ; arrive n’est que ce qui est possible », dire que la fonction doit découler d’un besoin irrévocable, un besoin instinctif et inévitable. Un besoin dans ce cas qui sera simplement celui de communiquer.

Inventeurs de mots, bâtisseurs de phrases, des ouvriers de l’inexistant, des paysans de l’imaginaire.

« …Ces raisonneurs si communs, incapables de s’élever jusqu’à la logique de l’Absurde. » Charles Baudelaire, le Spleen de Paris.

day 3

As the sickness prevails I find myself adapting to a lifestyle which by the least can be called different. It is a widely known fact that any creature, wise or less intelligent, adapts inevitably to its surroundings within the limits of its knowledge and capacity. That fact is not as simple as it looks.

As I take the first breath of afghan herbal products I find myself for the first time of my not-so-long life, in a state that I can proudly and without any doubt call legally stoned.

History has a way of molding and dismantling concepts and ideas in a way only the perverted mind of the human being can apprehend. It is these humanly concepts that I am trying to neglect.

Anyway, I finally got the distorted logic of this city’s streets; however I wouldn’t go so far as to say I know how to get around with my eyes closed. But it is now possible for me to go someplace and get back without having to go around in circles for long hours and endless steps.

day 2

After many unexpected and unwished for obstacles, I can now connect to the world. I arrived somewhat well enough to Amsterdam, except for a nasty cold I got somewhere between the all-the-same streets of this beautifully disoriented city. I spent the first 2 days losing my way and I still can’t figure out how the hell do people find their ways in a city where you can’t see the sun. Disoriented is the perfect word to describe what I am at the moment.

However I have finally resolved the internet problem and have to buy a new phone because mine lost his last breath supposedly on the airplane. Anyway my number is 0031 6 38167358.

Still no sign of breathtaking fun, I have spent my two first days walking and searching for miscellaneous items amongst which I proudly announce was a wooden spoon, a huge cucumber, various cleaning products (all instructions in Dutch) and other utensils and products.

Not yet properly introduced to Amsterdam’s favorite plant (too sick to do so), however its stench is one of the streets’ most common habitant.

Great view from my room, which I have to say, is much bigger than expected. Not yet fully loaded however, but as I start getting around this city I should furnish and make it a home. I haven’t found out where to find the less common items that are usually vital in any habitat, like for example a pillow or a dish rack.

I haven’t yet met my bathroom partner. The building is not yet vibrant with life. The garbage workers in Amsterdam are on strike and garbage is everywhere in the city but people don’t seem to mind.

Haven’t quite decided whether to get a bike or not but I am increasingly getting convinced, my muscles however definitely are.

samedi, août 20, 2005

Ouverture

Et l’aventure commence, tel un rêve, un songe, dans lequel les personnages sont tous inconnus. Au milieu du monde et de nul part, un espace que j’ignore autant que j’ignore mes pulsions les plus explicites, je regarde sans voir, je pense sans raisonner, la solitude est enfin à portée de main, la solitude, le compagnon éternel, le compagnon unique.

Suis-je perdu ? Suis-je aliéné ? Ou bien simplement, suis-je ? La réponse est loin d’être un but que j’ai tant rêvé, un trajet que je me suis prescrit, mon trajet.

Une anxiété latente se cache quelque part dans moi-même, une anxiété qui ne risque que de surfacer, une anxiété enrichissante, une anxiété vitale.

Le regret m’est étranger, le regret est alogique. Regret n’est qu’un concept indéniable mais erroné.

Je me plonge dans les mots pour nourrir la solitude ou serai-ce pour l’affamer ? A présent je n’en sais rien, à présent les questions sont toujours orphelines, des questions dépaysées, des questions qui ne cherchent que des réponses naissantes.

La volonté est mon tout. Le monde, disait Schopenhauer, est ma représentation. Et la représentation disait Marc Aurèle, est mon œuvre.

Créateur, artiste, le monde m’appartient.

19 – 8 – 2005 Aéroport de Schiphol, Amsterdam

Pré – face

Si les mots défunts d’un Marc Aurèle absorbent les vicissitudes des siècles, ils sont contraints de régulariser ou plutôt de mouvoir l’esprit d’un homme perdu dans le non-sens du temps. Je suis cet homme, un esprit vagabond qui résiste difficilement à l’instinct de survie. Autant je lis et je relis ces phrases sur des pages d’un livre inscrites dans l’oubli de l’histoire rationnelle, je ne peux que retrouver la question unique, la question primordiale, la question ultime qui se répète incessamment dans les vallées de mon esprit, tel un écho infini : Pourquoi suis-je ? Un questionnement enfantin, témoin d’une ignorance de la réalité, une ignorance que dans les décombres de ma conscience j’adore avec une perversité réjouissante. Toujours un touriste de la vie, toujours un apprenti-être, toujours en recherche de moi même ou d’un autre. Ma recherche à cet instant prend une dimension désormais différente, une dimension au moins étrangère ou encore une dimension inconnue. Je me livre au saut dans l’inconnu. Mais au contraire de Kierkegaard je n’appellerai point cet état celui de la foie mais celui du moi.

Aéroport de Beyrouth 19 – 8 – 2005

mercredi, août 17, 2005

Récapitulation

Je suis un touriste existentiel, un voyageur avec un carnet de note, une occurrence consciente de sa présence immédiate. Je me souviens par moments de l’apathie plaisante, de l’indifférence fataliste. Je ne peux surmonter le désir rassurant de la solitude. Je choisis l’échappatoire et j’en suis conscient. Une faiblesse dissimulée, un songe comme tous les autres, un mensonge ordinaire, commun différemment. Pourtant admettre et agir ne sont point uniformes.

La fin prend des formes imprévisibles. C’est le substrat de cette idée de finitude qui porte l’essence du sens, de tout sens. Sans fin rien n’existe, sans fin rien n’est. Il n y a de présent que s’il se termine au futur, le présent n’est qu’un passé immédiat. Des secondes de passé me semblent de plus en plus éloignées, je vis dans un passé continu qui renaît incessamment.

Je déguste l’amertume délicieuse de la mobilité temporelle, je ne suis qu’une idée dépourvue de sens, une perception volontaire.

mardi, août 16, 2005

Longueur d’onde

A la première lueur de soleil, c’est juste à ce moment unique par sa répétitivité incessante et éternelle, que mes neurones, à présent amoindris par les forces du corps et des matières, connaissent la vraie teneur du temps. Une lumière horizontale, portail de la lumière ambiante, prédécesseur de l’éclairement, dessine lentement les vicissitudes de mon existence. Instant répétitif, la clarté spirituelle, le moment spéculatif. La pensée m’envahi et je demeure, inévitablement, captif de l’inconscient qui surface. Bien que le concept même que porte le phonème inconscient me soit énormément répugnant, je ne peux qu’user d’une nuance relativement existentielle où la conscience de soi, aussi imparfaite qu’elle est, rencontre son imperfection dans une scène énigmatique où l’inconnu se dévoile en partie. J’existe continuellement. Exister est un acte. Un acte n’est quelque part qu’un mouvement quelconque d’énergie. L’énergie est périssable. J’existe toujours, difficilement, involontairement. Autant j’accorde de divinité à la volonté, je ne peux surpasser le fait que l’acte premier de moi-même n’était qu’involontaire et imposé.

« -Que faites vous du matin au soir ?

- Je me subis. » Cioran, De l’inconvénient d’être né.

Les interprétations et les raisonnements se divergent pour assimiler ce fait admis par certains. Un choix a priori doit suivre inéluctablement, une supposition initiale qui engendrera la logique, l’idée, la conception, la connaissance, la cognition, l’interaction, l’action, l’existence, la conscience.

Voilà le préjugé inévitable, le préjugé humain, la nécessité instinctive de la tendresse maternelle du préjugé.

Œdipe se métamorphose, son crime est désormais double.

Un jour au levé d’un soleil j’ai choisi mon préjugé.

samedi, août 13, 2005

Aiguille

Plus que quelques secondes, quelques minutes, l’équivalent de quelques dizaines d’heures et une poignée de jours. Lorsque je rentre dans moi même, je me parle discrètement. Durant ces visites personnelles, je trouve dans un coin de ma conscience des personnages troublés, des citoyens du doute. Dans ma société interne, ou ce qu’on appelle couramment esprit, les conflits verbaux se transforment subitement en une forme d’énergie incontrôlable et souvent illogique voire alogique qui s’empare de ma motricité physique et intellectuelle, et puis je panique momentanément. Peut être paniquer n’est pas le bon verbe, mais l’usage courant de ce terme aide à la facilité de son usage et l’ampleur de sa signification commune ou plus simplement sa connotation. Un verbe plus adéquat à l’état dans lequel je me trouve alternativement serai tourmenter. Le flux de questions et de probabilités qui varie en amplitude sans paradigme apparent, et qui, tout en paralysant l’activité cervicale consciente, provoque des pensées parallèles ou plutôt des spéculations qui se rangent au niveau de la faiblesse d’esprit. Me voilà devant un obstacle ou plutôt une étape inévitable et satisfaisante, la renaissance consciente, la naissance volontaire. Lorsque le temps est c’est que la vie est suspendue.

lundi, août 01, 2005

C’est Cupidon qui se tue

Rien n’a de sens autre que celui qu’on le lui attribue. Je pourrai passer ma vie dans un souvenir, je pourrai regretter et voyager dans les étendue plaisantes et marécageuses de la mémoire, mais la raison de tel acte n’appartiendra à nul autre que moi. Combien de fois ai-je goûté l’ivresse de l’apathie. Un homme sans regret, un homme sans passé, un homme sans mémoire, un homme.

Un nouveau chapitre s’ouvre violemment dans ma vie. Une conclusion regrettable mais inévitable. Kafka disait « tout ce qui est possible arrive ; arrive n’est que ce qui est possible ». Je ne suis point l’esclave du destin ou du sort, je suis l’auteur de mes tourments, l’écrivain de mes malheurs.

Je ne succombe point à la facilitée du chagrin. Je suis un être sans larmes.

Je déchire ton existence de mon être, tu n’existes plus au présent, tu n’es qu’une image qui se meut dans des scènes de ma mémoire. Une ombre, un songe, un spectre qui troublera mon esprit quelques fois, dans les moments de faiblesse. Quelques temps et j’éteindrais la haine qui te donnes le dernier privilège de mes sentiments, et puis rien, l’apathie éternelle.